Tenir ? Qu’est-ce qui fait que l’on tient ? Comment on tient ?
C’est cette question qui m’est venue dès qu’il a été question d’une possibilité d’un travail avec les détenus du Centre Pénitentiaire du Sud-Francilien (CPSF) à Réau, Seine-et-Marne, dans le cadre du Programme régional de résidences d’écrivains en Ile-de-France.
C’était déjà la première phrase de Sans autre guide ni lumière, qui s’ouvrait avec cette question - Qui tient bon ? - que posait Dietrich Bonhoeffer du fond de sa cellule à la prison de (...)
C’est un livre qui vient de loin. En 2004, avec mon compère photographe Olivier Pasquiers, nous avions réalisé un travail sur des anciens combattants marocains de l’armée française qui traînaient leur misère dans un foyer de Beauvais. Puis nous nous étions rendus au Maroc dans la région d’El Kelaa-des-Sraghna où, de douar en douar, nous avions visité leurs familles. Ainsi s’était écrit Oubliés de guerre. (Photo Olivier Pasquiers)
Nous avions profité de ce voyage pour nous rendre à Tanger dont, quelques (...)
Lorsqu’il y a un peu plus de deux ans je créai ce site, je pensais pouvoir : réunir la matière éparse de mon travail passé, le rendre lisible, et visibles aussi les liens entre ses divers modes rendre compte de mes différentes pratiques d’interventions publiques faire état du travail en cours, et, mettant régulièrement en ligne les pages produites, faire de l’écriture "pour" le site une des modalités de mon travail.
Or de ce dernier aspect il n’a jamais pu être question.
Obstinément l’écriture me (...)
Une rue, c’est toujours la possibilité d’être ailleurs. Celui qui, au lever du jour, a vu la rue Saint-Blaise naître de son asphalte, au milieu des platanes, a envie d’être un soleil...
En 1967, quelques mois avant que n’éclatent les événements de mai 68, et alors que se multipliaient les projets d’urbanisme qui envisageaient la destruction de la vieille rue Saint-Blaise pour faire place aux constructions modernes que l’on connaît aujourd’hui, Armand Gatti venait à la rencontre des habitants de la rue (...)
Cette fois lorsque je suis arrivé, la mer jusqu’à très loin au large semblait alourdie de tant de boue que l’on aurait dit que les vagues avaient du mal à dérouler leur rythme habituellement si hautain, astral, comme si revenues aux premiers balbutiements du monde elles en étaient encore à la difficile séparation, ici l’eau, ici la terre, les noms eux-mêmes manquaient qui avaient charge de les faire exister dans leur différence et leur coexistence.
La terre avait fondu dans la mer.
De cela j’avais pu (...)
Le week-end prochain, je serai à Carcassonne pour participer à une rencontre autour d’Armand Gatti. On m’a demandé d’intervenir sur "l’espace de l’écriture" de Gatti. Me voici donc au bord du vertige de l’univers tant cet espace est immense. D’autant qu’il faut immédiatement mettre tous ces termes au pluriel : les espaces de ses écritures, les vertiges des univers. Et à tous ces pluriels, accoler leurs contraires puisque selon le physicien Niels Bohr que cite et côtoie abondamment Gatti les vérités (...)
Les oliviers imposent deux temps forts à ceux qui les approchent.
La cueillette, bien sûr, au début de l’hiver, ce moment de jubilation collective, malgré le froid, souvent (et oui ! en Provence le mistral en hiver peut être glacial), les olives à poignée qui roulent entre les mains, et l’odeur virulente lorsque, à la fin de la récolte, le dos plié sous le poids des caisses pleines à ras-bord, on pénètre dans l’antre du moulin, dans son odeur, comme si l’air lui même avait été passé au pressoir avec les (...)
De retour à Montauroux. Pour tenter de donner forme à un projet de film documentaire sur le dernier troupeau de brebis résidant au village. Façon de parler. Car ici, faire paître un troupeau, c’est transhumance permanente. Entre prolifération des villas à piscine, zones commerciales, zones artisanales, Mac Donald, Leclerc, etc. les terres laissées en herbes sont de plus en plus rares. Et le berger passe le plus clair de son temps à déplacer son troupeau. De nuit. Car vu le flot ininterrompu de (...)
Sur la place de Montauroux, mon village, deux hommes âgés, assis sur un banc, conversaient en "patois" provençal. Sur le parapet, un peu plus loin, deux hommes à peu près du même âge, conversaient avec la même passion, en "patois" arabe de Tunisie. Leurs discussions étaient d’un même langage, dans la même posture des vieux méditerranéens. Seule la langue différait. Que leurs descendants demeurant au village, à plus ou moins brève échéances, ne parleraient plus.
Cette semaine je mets en ligne la suite de (...)
Où que je passe Noël, je transporte avec moi nos rites de Provence. Et même si, désormais, je me retrouve un peu seul à la messe de minuit, je sais qu’au retour mes enfants auront mis sur la table les treize desserts et leur impiété ne les empêchera pas d’essayer de chanter avec moi Dindouleto ma mio. Je ne dirais pas que "Jésus est né en Provence" comme le chantait naguère Mireille Matthieu (désolé, mais là je ne mets pas le lien !), mais d’une certaine manière il naît pour moi en provençal. Ou encore - (...)
Et chaque fois il faut réinventer le livre. Pas seulement "un" livre. Mais ce que c’est le livre, de quoi c’est fait, comment c’est fait, pas même qu’on l’ait oublié, maladie qui aurait fait que ça s’efface (si ce n’était que ça, tellement de livres sont là, juste devant le nez, et parmi eux, ses propres livres, il suffit d’ouvrir, de feuilleter, de lire - et c’est ce qu’on fait - pour voir, oh ça ! voir on peut, mais savoir ? comprendre ?) pas seulement, non, comme un savoir-faire perdu, mais bien plus (...)
Le 15 octobre dernier, en plein jour, un groupe d’une centaine de migrants a essayé de rejoindre l’enclave espagnole de Melilla située sur la côte marocaine. En sautant par dessus la double barrière grillagée de 6 mètres de haut, une vingtaine d’entre eux auraient réussi à passer. Les migrants qui ont pu entrer à Melilla se sont réfugiés dans une école. (article en espagnol)
Quelques jours plus tôt, une trentaine de migrants subsahariens de différentes nationalités (Cameroun, Congo, Mali) ont été (...)
Cette semaine je poursuis le travail de mise à jour du site.
Je mets en ligne la page de présentation de mon livre Le Vent vivant des peuples (Créaphis, 2006) que l’on peut voir ici.
Il est né d’une commande conjointe de la DRAC et du Fasild de Champagne-Ardenne qui m’avaient donné carte blanche pour écrire un texte sur "l’immigration en Champagne-Ardenne depuis 1945".
N’étant ni historien, ni sociologue, et n’ayant comme données que les recensements n’accordant aux immigrants qu’une réalité de (...)
La mise à jour que j’ai entreprise ici des textes que j’ai écrits sur Gatti vient inévitablement croiser l’imminence de la parution d’Un peu de toi dont on pourra déjà lire une présentation dans Le basilic, la gazette des Amis des éditions de l’Amourier.
J’ai dit les conditions de ma rencontre avec Monique sous l’égide du Chat guérillero, l’aventure théâtrale que Gatti avait lancée en 1975 au collège Jean Lurçat de Ris-Orangis (Essonne). Ce que j’en ai publié ici est devenu un des chapitres de Un peu de toi. (...)
C’était le début des années 80. A l’incitation de Gatti, je venais de publier mes deux premiers textes dans la collection Pierres Hérétiques, la structure éditoriale de l’Atelier de création populaire "L’Archéoptéryx" qu’il y dirigeait alors.
Il s’agissait de deux biographies de poètes. Le Haïtien Jacques-Stepephen Alexis. L’Irlandais Bobby Sands. Tous les deux morts assassinés.
Fort de cette expérience, je me jugeai à même de pouvoir écrire, à propos de Gatti lui-même, cette fois, la somme qui manquait (...)
Vendredi 31 août, à la Maison de l’arbre, à Montreuil. Je suis venu assister à l’une des représentations de Rosa Collective, une pièce de Gatti qui date du début des années 70 et qu’il a décidé de remonter avec une vingtaine de jeunes volontaires venus de Montreuil, de Montpellier, de Strasbourg. Des étudiants, de jeunes rebelles engagés dans des combats au jour le jour. Pendant toute la représentation, Gatti est là, au premier rang, qui soutient du poing et du regard, et n’hésite pas à mêler sa voix à (...)
Il paraît qu’il ne faudrait pas (comme je l’ai fait la semaine dernière) dire publiquement les difficultés que l’on a à faire publier certains textes, que ça ne fait pas bien dans le paysage, que ça peut porter tort à "la carrière".
Lorsque j’ai ouvert ce site au début de l’année, mon but n’était pas d’en faire une vitrine promotionnelle, mais bien plutôt un espace de réflexion, de mise en perspective de mon travail.
Or il se trouve qu’une des caractéristiques du chemin que j’ai eu à parcourir, c’est que, (...)
Je viens de terminer la correction des épreuves de Un peu de toi qui paraîtra en octobre aux éditions L’Amourier.
J’ai déjà dit ici mon effort pour tenter d’arracher un texte au chaos de la mort de Monique, ma compagne. J’ai dit mes difficultés à faire éditer un pareil texte.
Il y a heureusement des éditeurs qui ne pensent pas en terme de "genres", de "catégories", qui n’essaient pas de mettre les textes dans des cases. L’Amourier est de ceux-là qui publie donc sous le titre Un peu de toi ce travail que (...)
Et pour ne pas bronzer pas trop idiots, je mets en ligne la version e-book de Nice, le bleu du galet, et en avant goût, la première page :
Notre enfance n’avait que faire des marbres et de l’or. Nous ne savions pas où nous vivions. La mer nous était quotidienne. De la terrasse qui servait de cour sur le toit de l’école, on pouvait la voir se pourlécher d’écumes. Mais les jeux, les billes, les bagarres, les dictées réussies ou ratées tenaient bien plus de place dans nos vies, plus de peurs aussi, plus (...)
Je continue d’exhumer des textes anciens que provoqua mon arrivée à Draveil, dans la banlieue sud de Paris.
A cette époque, je parcourus les territoires alentour essayant de découvrir de quoi ils étaient fait. Delacroix et la forêt de Sénart. Lafargue et Draveil. J’appris ainsi que sur les terrains où commençait à se déployer une Base de loisirs, s’étaient déroulés, en 1908, de très violents combats opposant les carriers de la Seine à la direction des Sablières soutenues par le gouvernement de Clémenceau (...)