Joseph Lépine devrait être enterré cette semaine dans le cimetière chrétien de Oujda, au Maroc, dans lequel il y a quelques années je l’avais photographié.
Dans ce cimetière, Joseph avait voulu me montrer les tombes des migrants clandestins qu’il y avait fait enterrer.
L’accueil des migrants clandestins a été la grande oeuvre de sa vie.
Il leur avait ouvert son presbytère de la cathédrale catholique de Oujda.
Il leur avait ouvert ouvert la cathédrale elle-même dont il avait transformé les chapelles latérales en lieu d’accueil pour les femmes enceintes ou avec des bébés.
Il leur avait ouvert sa vie, ne ménageant aucun effort pour les vêtir, les nourrir, les faire soigner, et les remettre sur la route le moment venu.
Avec ce mélange de tact et d’audace, de patience et de colère, il avait réussi à obtenir de la part des autorités une certaine neutralité vis à vis de ce qu’il entreprenait.
Je raconte ici, sur ce site, le rôle qu’il a joué pour moi dans l’écriture du Pays que je te ferai voir. Je me suis largement inspiré de lui dans le personnage du père Adolphe.
Pour tous ceux qui l’ont connu, ce fut chance et bénédiction que de croiser un tel homme sur sa route.
Qui toujours ramenait à l’essentiel de la solidarité humaine.
S’opposant avec courage aux lois injustes.
A l’encontre de sa propre hiérarchie, s’il le fallait.
Pensant au père Jospeh, je pense au petit Joseph qu’il avait baptisé une nuit de Pâques dans sa cathédrale.
Il avait accueilli la mère, migrante clandestine, enceinte.
Il n’y avait pas de place pour elle à l’hôtellerie.
Il lui avait accordé le gîte pour qu’elle puisse mettre au monde son fils.
A lui tout seul il s’était fait âne et bœuf pour que Noël une fois encore fut possible.
Ce sont des hommes comme Joseph pour qui la lutte et la charité ne font qu’un qui, chaque jour, dans le plus grand anonymat, sauvent l’humanité du désastre.