14 séquences, pour accompagner des photos d’Elizaberth Billhardt
Séquence 6 : « Toujours recommencée »
Chaque jour est un nouveau jour. Un nouveau ciel. Une nouvelle mer. On l’a quittée étale comme un grand lac, avec ici et là de fragiles ondulations, et voilà qu’au détour de la nuit la mer a changé de style, de couleurs, d’entrain. Il a suffi que le vent se lève, quelque part, au loin, pour que les vagues s’enhardissent, se dressent, roulent, et viennent gifler la plage d’une ardeur impensable la veille. Ce sont alors ces giclées blanches d’écume qui viennent s’effriter sur les avancées de pierre que l’on a jetées sur la mer pour justement en briser l’impétuosité. On comprend alors la fonction principale de ces pointes rocheuses que les spécialistes appellent « digue à talus ». Aux jours de grand calme, on avait pu croire que c’était seulement pour la commodité des pêcheurs, ou le plaisir de se tenir au milieu des vagues alors que ces digues sont les armes d’une lutte invisible entre la terre et la mer. Lutte millénaire. Comme si la mer n’avait jamais vraiment renoncé à reconquérir les immensités qu’elle recouvrait autrefois. Mais vient un jour nouveau. Et tout cela est oublié. La mer offre ses turquoises à la lenteur du ciel. On dirait une nappe finement repassée. Pour un jour. Un jour seulement. Demain ce sera encore une toute autre histoire. Chaque jour comme si c’était le premier.