J’ai encore ouvert la fenêtre
à la caresse matinale du soleil
la mer au loin
semblait si familière
que c’en était presque
inquiétant
peut-on s’habituer
à sa présence
je sais bien des riverains
qui ne la voient même plus
lui tournent le dos
vivent hors d’elle
le temps use le regard
la paresse vient vite :
la mer tournera bien
sans moi
s’obliger à demeurer
en présence de la mer
en être jour après jour
l’obligé
venir y affûter
notre fragile conscience
la mer exhausse
qui la regarde
le plus solitaire
s’y découvre l’un
d’une multitude
vie qui renvoie à la vie
sillages qui ouvrent des traversées
rives qui battent au souffle d’invisibles poitrines
la mer est la matière
dans laquelle le temps
s’écrit en lettres d’eau
mer en expansion
en extension
en transmission
naissance de l’histoire
dont la vague n’a de cesse
de démultiplier le récit
qui oublie la mer
n’a plus pied sur terre